Inauguration de la rue Willy De Bruyn : première rue dédiée à un homme transgenre à Bruxelles

Quiconque se balade dans le quartier entre la Gare du Nord et Tour & Taxis remarquera désormais que la fin de l’Allée verte porte le nom d’un héros oublié de l’histoire du cyclisme belge. Le nom de Willy De Bruyn continuera de résonner dans le quartier où il a longtemps tenu un café. Son histoire est plus qu’actuelle et raconte le combat d’un athlète transgenre à une époque où les questions de transidentité constituaient encore un tabou. La rue Willy De Bruyn (croisement Allée verte et Av. de l'Héliport) sera inaugurée ce vendredi 5 juillet à 17h en présence d'Ans Persoons, Échevine de l'Urbanisme et des Espaces publics, et de Khalid Zian, Échevin de l'Égalité des chances.

 

Ans Persoons (Change.Brussels), Échevine de l’Urbanisme et des Espaces publics, en charge de la dénomination de voiries :

L’espace public est le reflet de l’histoire collective. De tou.te.s. À travers les dénominations de rues, nous gardons en mémoire celles et ceux qui ont permis de faire avancer la société. Willy De Bruyn fait partie de ces personnes, dont l’histoire mérite d’être connue, dans son combat pour faire reconnaître les personnes transgenres. Nous espérons ainsi améliorer la visibilité des transidentités et apporter notre soutien dans la lutte contre les discriminations et la transphobie.

 

Qui est Willy De Bruyn ?

1914. Le monde plonge dans quatre années d’abîme profonde. Quelque part entre Bruxelles et Alost naît un petit enfant dont les jeunes parents lui assignent une identité féminine et lui donnent le nom d’Elvire De Bruyn. Certains documents relatent également que Willy De Bruyn était une personne intersexe, c’est-à-dire, « qui présente à la naissance des caractères sexuels qui, en raison d’une large gamme de variations naturelles, ne correspondent pas à la définition type du masculin et du féminin des sexes ‘mâle’ et ‘femelle’ »[1].

Dans tous les cas, Willy est considéré dans son entourage comme une fille forte et farouche. Dans le café des sports des parents De Bruyn, on discutait déjà de son genre. À 14 ans, Willy termine l’école, comme il était fréquent à l’époque. Il travaille d’abord dans une fabrique de cigarettes, puis dans le café des sports de ses parents.

Willy participe à sa première course cycliste à l’âge de 15 ans et s’impose avec 7 minutes d’avance. Mais sa mère n’imagine pas son enfant évoluer dans le monde de la course. Les femmes cyclistes n’étaient pas bien vues à l’époque, jugées inconvenables. Willy est cependant doué pour la course. Au point que sa notoriété apporte même argent et visibilité pour le café familial. En 1934 et 1936, il devient champion du monde de cyclisme chez les femmes.

Willy goûte alors au succès mais subit également le mépris du public qui se pose des questions sur son apparence physique masculine. Il se plonge alors dans la littérature traitant de transidentité, inspiré par l’athlète tchécoslovaque Zdeněk Koubek qui a changé de genre et a subi en 1936 une opération masculinisante.

À partir de 1937, Willy délaisse le nom d’Elvire qui lui a été assigné à sa naissance et choisit « Willy » comme prénom définitif. Officieusement d’abord, avec une fausse pièce d’identité, mais il se heurte vite à des obstacles. C’est pourquoi il souhaite franchir une nouvelle étape : se faire reconnaître homme juridiquement. Après un premier rejet auprès d’un juge, Willy obtient gain de cause le 24 mars 1937. Il met un terme à sa carrière cycliste et s’établit à Bruxelles où il ouvre avec son épouse un café, le « Denderleeuw ». Willy De Bruyn décède à Alost à 75 ans.

 

La question du genre dans le sport

L’histoire de Willy De Bruyn amène un bon nombre de discussions au cœur desquelles se trouve la question de l’identité, de libre-choix et d’auto-détermination. Être libre de choisir son identité de genre, non pas celle qu’on nous a assignée, mais celle dans laquelle on se reconnaît le mieux. Encore un tabou à l’époque de Willy De Bruyn. Progressivement devenu une question de société parce que de Droits Humains. Et aujourd’hui, une réalité acceptée par tou.te.s ?

Les temps changent. Les mentalités évoluent, mais la société doit encore surmonter certaines idées reçues concernant les personnes transgenres et leur combat pour l’acceptation de leur identité. Il faut continuer à sensibiliser, informer, et discuter.

 

Khalid Zian (PS), Échevin de l'Égalité des chances :

Cela passe par des évènements comme la Pride ou par les différentes actions que mènent la Ville et la cellule Égalité des chances, tout au long de l’année. L’ inauguration de cette rue est donc une corde que nous rajoutons à notre arc afin de montrer que les personnes transgenres sont présentes dans l'histoire et la culture de notre pays.

La place des personnes transgenres dans le monde du sport est d’autant plus délicate que les disciplines sportives sont fortement marquées par la division des sexes. Une question qui n’est pas évidente mais qui doit être discutée, sans tabou, sans cliché, sans discrimination, dans un cadre bienveillant, avec l’usage de terminologie appropriée.

La coureuse sud-africaine spécialiste du 800m, Caster Semenya, en est un bon exemple. Elle a fait l’objet de vifs débats dans la presse internationale car son corps présentait un taux anormalement élevé de testostérone. La Confédération Africaine d’Athlétisme a estimé que les athlètes « hyper-androgènes », secrétant naturellement plus de testostérone que la norme pour les personnes de sexe femelle, sont favorisées et doivent par conséquent être exclues des courses féminines à moins de prendre des médicaments pour réduire leur taux de testostérone, et ce, à partir de novembre 2019. Cette décision est controversée du fait des effets secondaires néfastes possibles de ces médicaments anti-androgènes. Il se pourrait même que les femmes concernées participent plutôt à des compétitions masculines.

 

La rue Willy De Bruyn (croisement Allée verte et Av. de l'Héliport) a été approuvée au Collège du 20/06/2019 et sera inaugurée le 05/07/2019 à 17h.

Ensuite, nous invitons les intéressé.e.s à enfourcher leur vélo et nous suivre jusqu’au Muntpunt à 18h où nous partagerons un verre dans le cadre de la « Nuit du vélo » organisée par l’asbl RoSa, deBuren et Velomuseum/AMVB. Cela discutera vélo mais aussi de la place des femmes dans le milieu cycliste.

Les photos de l'inauguration seront disponibles sur demande auprès de monsieur Jens Popelier : [email protected].

 

[1]Brochure d’informations générales sur les transidentités réalisée par l’asbl Genres Pluriels, octobre 2018 : https://www.genrespluriels.be/IMG/pdf/brochure_oct2018_web.pdf

Thi-Tiên Trân

Attachée de presse, Cabinet de l'Échevine Ans Persoons

À propos de Ans Persoons

Secrétaire d'Etat à la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de l'Urbanisme et du Patrimoine, des Relations européennes et internationales, du Commerce extérieur et de la Lutte contre l'incendie et l'aide médicale urgente

Membre du Collège de la VGC Culture, Jeunesse, Sport, Vivre ensemble dans la diversité

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