La Ville de Bruxelles inaugure la rue Yvonne Nèvejean à Laeken
Figure majeure de la résistance belge, elle contribua à sauver 3.000 enfants juifs durant l’occupation du pays
Le nouveau quartier Tivoli à Laeken compte désormais deux noms de rues de femmes. Après avoir rendu hommage à la résistante belge Andrée De Jongh le mois dernier, le Collège des Bourgmestre et Échevins a inauguré cet après-midi la rue Yvonne Nèvejean, une autre figure importante de la résistance belge. Par son action et en collaboration avec le Comité de défense des Juifs, elle contribua à sauver plus de 3.000 enfants juifs en leur procurant de fausses identités et en les soustrayant à l'autorité allemande durant l’occupation du pays. La rue a été inaugurée en présence des Échevins Ans Persoons et Khalid Zian, ainsi que le président de l’asbl Enfants Cachés, Adolphe Nysenholc.
Ans Persoons,
Échevine de l’Urbanisme et des Espaces publics, en charge de la Dénomination des voiries :
L’histoire belge regorge de récits de femmes héroïques qui n’ont pas eu la reconnaissance qu’elles méritent. Yvonne Nèvejean fait partie de ces femmes au courage exceptionnel qui ont milité toute leur vie pour une société plus juste, qui ont entrepris des choses incroyables risquant leur vie pour sauver celle des autres ; celle de 3.000 enfants durant la Guerre. Et pourtant, trop peu de personnes connaissent leur nom. La Ville de Bruxelles poursuit la féminisation des noms de voiries sur son territoire pour ne pas les oublier, car l'espace public est le reflet de l'histoire collective. Pensons à la Drève Anna Boch, au futur pont Suzan Daniel, militante LGBTQI, enjambant le canal au niveau de la rue Picard, à la nouvelle voirie qui verra bientôt le jour à Laeken sous le nom de la juriste spécialisée en droit du travail Eliane Vogel-Polsky... Aujourd’hui, nous inaugurons une rue dans un nouveau quartier de Laeken. L’espace public change et sera résolument plus féminin.
Philippe Close,
Bourgmestre :
Bruxelles est riche d’une nouvelle rue portant le nom d’une femme et j’en suis ravi. Yvonne Nèvejean mérite le plus grand respect pour son engagement durant la Guerre et pour avoir contribué à sauver 3.000 enfants en danger. Lui consacrer le nom d’une rue permettre de ne pas oublier qui elle est et ce pour quoi elle s’est battue.
Qui est Yvonne Nèvejean ?
Yvonne Nèvejan nait le 15 novembre 1900 à Gentbrugge. Elle obtient un diplôme d'auxiliaire sociale en 1922 lors de ses études à l'École centrale de Service Social de Bruxelles. Elle étudie à l'Université de Gand puis aux États-Unis où elle décroche une maîtrise en sciences sociales et politiques à l'Université de New York. Après son retour en Belgique en 1928, elle commence à travailler pour l'Œuvre Nationale de l'Enfance (aujourd'hui dénommé Office National de l'Enfance [O.N.E.]), une organisation parastatale qui supervisait un réseau de foyers pour enfants en difficulté à travers toute la Belgique. Elle gravit rapidement les échelons de l'organisme jusqu'à en assurer la direction générale en 1940.
En août 1942 lorsque commencent les premières déportations de juifs en Belgique, Yvonne Nèvejean est contactée par le Comité de défense des Juifs, une toute récente organisation clandestine fondée par Hertz Jospa et son épouse Yvonne Jospa. Ils lui demandent de prendre part au sauvetage et à la dissimulation d'enfants juifs dans des familles et des institutions dépendant de l'Œuvre Nationale de l'Enfance. Plus de 3.000 enfants purent ainsi échapper à la barbarie nazie grâce au ravitaillement assuré par les infirmières-visiteuses. À la fin de l’année 1943, Yvonne Nèvejean en deviendra membre à part entière du Comité de défense des Juifs. Lorsque ces fonds s'avèrent ne plus être suffisants, Yvonne Nèvejean obtient un soutien financier auprès des banques, du gouvernement belge en exil à Londres et de l'American Jewish Joint Distribution Committee (Joint).
La Gestapo tente bien de mettre un terme aux activités d'Yvonne Nèvejean. Même si plusieurs résistants ou bénéficiaires du réseau furent arrêtés, jamais l'organisation clandestine ne cessa son activité qui était soutenue par la Reine Élisabeth et d'autres résistants belges comme Léon Platteau, alors secrétaire général du ministère belge de la Justice.
Yvonne Nèvejean a été membre de plusieurs associations. Elle a aidé à fonder en 1944 l'association « Aide aux Israélites victimes de la guerre » et en 1964, « l'Amicale des Anciens du CDJ ». Elle sera à l'initiative des liens entre l'ONE et le conseil général de la Croix-Rouge de Belgique.
En 1996, la Poste belge émet un timbre à son effigie.
Khalid Zian,
Échevin de l’Égalité des chances, conclut :
Force est de constater que trop peu de lieux dans l’espace public portent des noms de femmes. Pourtant, l’Histoire regorge de personnalités féminines illustres tout comme Yvonne Nèvejean. C’est pourquoi la Ville de Bruxelles a intégré dans son Plan d’action pour l’égalité entre les femmes et les hommes cet objectif de féminisation des rues, places et bâtiments publics. Nous souhaitons une représentation plus égalitaire pour les femmes.