« The Grand Opening », une installation artistique pour une contextualisation du Monument aux pionniers belges au Congo

Bruxelles, 21 mars 2024 – Journée internationale de lutte contre le racisme

Ans Persoons, Secrétaire d'État bruxelloise à l’Urbanisme et au Patrimoine, Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'État bruxelloise en charge de l’Égalité des chances et Anaïs Maes, Échevine de l'Urbanisme et des Espaces Publics de la Ville de Bruxelles ont dévoilé ce jeudi 21 mars l’installation « The Grand Opening » réalisée par Traumnovelle à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre le racisme. Via cette installation artistique temporaire du Monument aux pionniers belges au Congo, Traumnovelle réussit subtilement à visibiliser et questionner cette trace majeure de la colonisation à Bruxelles en créant un espace de débats et de réflexions afin que le spectateur porte un nouveau regard sur notre histoire collective.

"Il est temps d’arrêter de détourner le regard sur l’une des pages les plus sombres de notre histoire collective. Ouvrons nos yeux. ​
Bruxelles comptent des monuments, statues, stations de métro, noms de rues qui glorifient aujourd’hui encore notre passé colonial et rendent hommage à des hommes ayant participé à la mort de milliers de congolais, burundais, rwandais au nom d’une prétendue 'mission civilisatrice'. ​ Cette entreprise funeste marque encore profondément notre société d’aujourd’hui. ​
Dans le cadre du Plan de Décolonisation, et grâce à Traumnovelle, ce monument se transforme en anti-monument. D’un instrument de propagande, il devient un regard critique et anti-raciste sur le monde et servira pour des représentations, des lectures et débats.
" déclare Ans Persoons, Secrétaire d'Etat bruxelloise à l'Urbanisme et au Patrimoine.
« C’est une première en Belgique : aujourd’hui le 21 mars devient officiellement, pour la Région bruxelloise, une journée de lutte contre le racisme. N’oublions jamais que le racisme est un danger pour notre société et menace la démocratie. Notre histoire est inscrite dans les murs de Bruxelles. Il faut la raconter justement et déconstruire les stéréotypes racistes.» déclare Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'Etat bruxelloise à l'Egalité des chances.
« J’ai grandi dans le quartier du Cinquantenaire et plus jeune, je considérais le parc comme mon jardin. Je connais donc très bien le « Monument aux pionniers du Congo » qui a fait partie de mon paysage quotidien. Souvent, nous passons devant des monuments sans même y prêter attention, car ils font simplement partie intégrante de notre environnement familier. Nous les voyons sans vraiment les voir, acceptant leur présence sans remettre en question leur signification et les raisons pour lesquelles ils ont été placés dans l’espace public. C’est l’héritage de notre ville, voilà. Sauf que non. Il est temps de regarder au-delà de la familiarité, d’examiner et de questionner cet héritage. Traumnovelle pose un regard critique sur ce monument par une installation qui déconstruit son histoire et qui place le débat, la rencontre et la réappropriation au cœur du projet. La décolonisation exige de ne pas se reposer sur ce qui est donné ou acquis, mais de reconnaître les erreurs du passé et de concevoir un espace public où chaque voix compte, où chaque histoire est honorée, et où chaque être humain est respecté. » indique Anaïs Maes, Echevine ​ de l'Urbanisme, des Espaces Publics et du Patrimoine à la Ville de Bruxelles.

L’art, comme contextualisation et appel à la réflexion

Avec The Grand Opening, Traumnovelle invite les spectateurs à vivre une expérience unique : une ​ reconstitution contemporaine et réinterprétée de l’inauguration historique du monument du 11 mai 1921 tout en distançant le monument de son silence antérieur. Via son rideau de scène monumental et la disposition scénique, Traumnovelle immerge le spectateur dans une scénographie nouvelle l’invitant à porter un autre regard sur cet ancien monument à la gloire de la colonisation du Congo. Traumnovelle pousse le spectateur à s’interroger, à observer les détails et à analyser les codes du discours et de la propagande coloniale.

The Grand Opening se base sur le concept de speakers’Corner de Londres, où chacun peut prendre la parole librement et assumer un rôle temporaire d'orateur devant l'assistance du moment. Face aux éléments racistes et la violence du monument, l’installation transforme cet espace en une scène suspendue, qui invite à porter un autre regard et entend inscrire le monument au cœur d’un espace de dialogue et de réflexion. The Grand Opening vise une distanciation critique par rapport aux récits coloniaux originaux.

Par son caractère temporaire, l’emploi de matériaux ordinaires de construction, ou encore, d’une œuvre qui ne vise pas à remplacer le monument, l’installation s’oppose à la monumentalité. Il s’agit d’un contre-monument qui interroge le narratif existant. L’installation pointe les relations de pouvoir qui ressortent de la photo de l’inauguration en 1921 : les liens entre l’architecture et le politique ; la place des autorités coloniales et de leurs certitudes condescendantes et la place des colonisés, absents des photos d’origine. Cette démarche de décolonisation doit en effet être comprise comme un processus et non comme un point final. L'objectif est ici de rendre visible ce qui jusqu'à présent était invisible.

Un monument colonial controversé

Classé le 18 novembre 1976 au titre de site, avec l'ensemble du parc du Cinquantenaire, le monument aux pionniers belges au Congo est l’œuvre du sculpteur belge Thomas Vinçotte. Il se situe non loin de l’allée centrale, dans la partie nord-ouest du parc.

Envisagé dès 1909, au lendemain du décès du roi Léopold II, le mémorial rend hommage à « l’œuvre civilisatrice » des premiers colons belges au Congo. Il célèbre en outre la cession de la colonie à la Belgique en 1908. Afin de gérer son édification, un comité national est créé en 1911 sous le haut patronage du roi Albert Ier. Il est partiellement financé par l’État, par la Ville de Bruxelles, ainsi que par le biais d’une souscription. Entièrement réalisé par le sculpteur Vinçotte, le mémorial, dont certains détails végétaux se teintent d’Art nouveau, est conçu à partir de 1912 et sculpté sur place. À cause de la Grande Guerre, le monument ne sera cependant inauguré qu’en 1921.

Louée à l’époque de sa création, l’œuvre est depuis plusieurs années controversée et identifiée comme l’une des principales traces coloniales de la capitale. Les scènes et citations qui y sont présentées, établissent en effet explicitement des hiérarchies de pouvoir et promeuvent des stéréotypes racistes. Le monument illustre également le lien économique fort qui existe entre l'Art nouveau et la période coloniale belge. Lors de l'exposition universelle de 1897, les visiteurs avaient découvert ce "nouvel art" surnommé "Style Congo ", en raison de sa propagande en faveur de la colonie.

"L'architecture est un outil politique. Les dispositifs spatiaux, formes et matières contribuent à construire les histoires que nos sociétés (se) racontent. Il n'y a pas de bonne réponse sans bonne question. The Grand Opening est une installation qui vise certes à dévoiler la charge historique de ce monument, mais surtout d'interroger les liens que nous souhaitons entretenir avec lui, et les discours qu'il véhicule, aujourd'hui." déclare Traumnovelle.

21 mars & décolonisation de l’espace public

A la demande du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’initiative du précédent Secrétaire d’Etat bruxellois Pascal Smet, un groupe de travail constitué par Urban a été chargé, entre 2020 et 2022, d’élaborer des recommandations pour la décolonisation de l’espace public. La synthèse de ces travaux a donné lieu à un rapport publié en 2022. Sur cette base, le plan d’action « Vers la décolonisation de l’espace public en Région de Bruxelles-Capitale » a été établi et approuvé par le Gouvernement en mai 2023.

Cette installation artistique initiée à l’occasion de la programmation "Art Nouveau Brussels 2023" s’inscrit pleinement dans le cadre de ce plan d’action. Ce projet vise à mettre en œuvre l’action 11 du plan qui préconise l’organisation de diverses actions de sensibilisation sur notre passé colonial et post-colonial. De plus, via une collaboration entre la Région et la Ville de Bruxelles, l’action 12 qui appelle à développer un processus participatif avec les communes portant sur le traitement des différentes traces de notre histoire coloniale, telles que l'adaptation et/ou la contextualisation des monuments contestés, est également enclenchée.

Enfin, cette installation artistique rencontre l’action 4 du « Plan bruxellois de lutte contre le Racisme » qui vise désormais à commémorer officiellement chaque année le 21 mars comme la Journée internationale de lutte contre le racisme.

A l’occasion du dévoilement de cette installation, Laurence Vielle, Jan Ducheyne, Teuk, Avery Bertrand Iradukunda, Laryssa Kim, Pitcho Womba Konga et Esther Kouablan, directrice du MRAX, sont intervenus via différentes ​ performances artistiques et prises de paroles afin de lancer le processus de débats, de réflexions et de distanciation critique par rapport aux récits coloniaux originaux présents sur ce site.

The Grand Opening est une œuvre pilotée et financée par urban.brussels et la Ville de Bruxelles dans le cadre de « Art Nouveau Brussels 2023 » pour un montant de 105.000,00 €.

The-Grand-opening.pdf

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Alessio Papagni

Porte-Parole, Cabinet Secrétaire d'Etat bruxelloise Ans Persoons

Mathieu Nguyen

Porte-Parole, Cabinet Secrétaire d'Etat Nawal Ben Hamou

Thi-Tiên Trân

Porte-parole FR, Cabinet Echevine Anais Maes

 

À propos de Ans Persoons

Secrétaire d'Etat à la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de l'Urbanisme et du Patrimoine, des Relations européennes et internationales, du Commerce extérieur et de la Lutte contre l'incendie et l'aide médicale urgente

Membre du Collège de la VGC Culture, Jeunesse, Sport, Vivre ensemble dans la diversité

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